« Innovation et Transformation de Business Models : Business Models durables et Social Business ». Voici le thème de la deuxième des quatre tables rondes de la Journée de la Chaire TREND(S) co-animée par le Pr. Xavier Lecocq (Université de Lille) et Pierre Arlaud, Directeur Impact & Innovation Sociale chez IDKids. Derrière cet intitulé, une question essentielle : « Comment les business Models peuvent-ils devenir plus durables ? ». Pour y répondre, se sont joints aux chercheurs Agathe Ruckebusch, responsable du pilotage de la stratégie RSE (Leroy Merlin), Nicolas Cordier, Social Business for Impact (Leroy Merlin), Cécile Delivre, déléguée générale Fonds de dotation chez We Act For Kids (IDkids), Katia Gradel, directrice Boulanger seconde Life et Antoine Bagur (CircularX by Re-commerce).

En effet, aujourd’hui contexte et législation poussent les entreprises à transformer leurs Business Models pour les rendre plus sociaux et plus durables. Mais, si l’objectif fait globalement consensus, sa mise en œuvre n’en est pas pour autant aisée. Celle-ci s’accompagne de tensions. Diverses et paradoxales. « Produire moins mais générer toujours autant de chiffres d’affaires », cite notamment le Dr. Guillaume Do Vale, l’un des chercheurs travaillant sur ces sujets. Des nécessités contradictoires auxquelles sont confrontées toutes les enseignes partenaires.

« Nous pourrions par exemple arrêter les « Premiers prix » car ils ont souvent une forte incidence environnementale, mais cela impacterait alors les personnes les plus précaires », note Agathe Ruckebusch de Leroy Merlin. Des décisions ont cependant déjà été prises et appliquées par l’enseigne avec l’arrêt des ventes de certains produits comme les chauffages « grille-pains », très énergivores, ou les parasols chauffants. Et l’inflation récente ne fait qu’accroître les paradoxes. « Quand les matières premières augmentent, qu’est-ce que l’on doit faire ? Délocaliser ? Réhausser les prix ? », interroge la responsable de la stratégie RSE.

A cela s’ajoute une « certaine schizophrénie » des consommateurs. « Ils ont envie de se transformer, sont frustrés de ne pas le faire et en même temps, ils viennent aussi largement- et tant mieux- dans notre enseigne pour s’équiper », remarque Katia Gradel de Boulanger.

Malgré les difficultés rencontrées, chercheurs et professionnels de la distribution s’accordent sur la nécessité de changements profonds. « Il faut transformer les modèles durablement pour être encore en vie demain. Cela demande de dépasser les stratégies « Less Bad » et « More good » ». C’est-à-dire de non seulement diminuer nos impacts négatifs mais aussi de travailler sur les stratégies d’impacts positifs », affirme Nicolas Cordier de Leroy Merlin.

Et des solutions pourraient être à chercher à l’intérieur même de l’organigramme des entreprises. En effet, dans de nombreux grands groupes, celui-ci compte un fonds social, ou Social Business. C’est le cas notamment de IDKids avec « We Act For Kids », un fonds de dotation agissant pour les enfants et les familles en situation de fragilité.

« Pendant un temps, nous étions un peu de côté. Désormais, il est remis au cœur de la marque », constate Cécile Delivre, déléguée générale de « We Act For Kids ».

Parmi les projets menés, « Love Maille » à Roubaix. Des femmes en insertion accompagnées par une association locale se voient ainsi confier le tricotage de la mini-collection de layette dessinée par Jacadi. Autre exemple à Madagascar où le partenariat entre Jacadi et l’association Tohana permet à des mamans des bidonvilles d’Antananarivo d’apprendre le métier de couturière. Leur production est ensuite vendue dans les magasins de la marque.

Mais tous ne connaissent pas encore le même succès de leur Business Model. « Love Maille n’est, pour l’instant, pas à l’équilibre. « Les bénéfices des ventes restent insuffisants, mais on y travaille », assure Cécile Delivre. Une étape déjà atteinte à Madagascar. « Les produits se vendent très bien. Au point que l’on a les moyens d’ouvrir une crèche pour les mamans. Mais, évidemment, il n’y a pas les mêmes coûts qu’en France », rappelle la déléguée générale.

L’objectif étant, qu’à terme, ces projets puissent fonctionner de façon autonome au fonds social. « Ces Business Models doivent encore évoluer. Nous en avons conscience », confie Pierre Arlaud d’IDKids. Des pistes de réflexion seront sans aucun doute à puiser parmi les résultats des recherches de la Chaire entamée depuis 18 mois sur le sujet.

A.C. pour la communication de la chaire TREND(S)