Prévention du cancer, modélisation de la face cachée de la Lune ou encore traduction simultanée en 200 langues, les dernières applications de l’Intelligence artificielle (IA) font régulièrement les gros titres de l’actualité. Cependant, celles-ci s’étendent bien au-delà de ces annonces extraordinaires. « L’IA est déjà présente un peu partout dans le quotidien, notamment des entreprises, expliquent les doctorants Hafida Boudkouss et Redouane Jidal. Cependant, des dérives nous poussent à la réflexion ».

Un vaste sujet donc, sur lequel s’est penchée la troisième table ronde de la Journée de la Chaire TREND(S), co-animée par le Pr. Mbaye Diallo de l’IAE de l’Université de Lille et Jean-Pascal Dubreuil, directeur études et prospectives Boulanger. Cédric Poncelet, Chief New Business Officer (IDkids), Benjamin Rey, Chief Data Officer (Leroy Merlin) et Pierre Blanc, directeur site Lille (Cap digital) étaient présents sur scène pour en discuter avec les chercheurs.

« Proposer l’IA n’a pas pour objectif de gagner du temps, mais bien de faire mieux. Elle est devenue indispensable pour proposer de nouveaux services, être plus efficace et mieux travailler avec nos clients », explique Benjamin Rey. L’IA chez Leroy Merlin permet par exemple d’optimiser la chaîne logistique. Sans pour autant remplacer l’humain. « A aucun moment ce n’est sa vocation, souligne-t-il. On embauche d’ailleurs énormément côté Supply Chain. La robotisation vient donc en aide aux équipes. « Sans elle, nous n’arriverions pas à traiter autant de colis pour tous nos clients », ajoute-t-il.

L’IA permet aussi de faire davantage de prévisionnel. « A trois, six mois sur la quantité de produits que nous devrons avoir à différents endroits. C’est indispensable quand, comme nous, on veut que chaque magasin ait la bonne offre pour le bon client », précise le Chief Data Officer de Leroy Merlin. L’analyse automatique des datas représente notamment un outil précieux pour les collaborateurs en charge des catalogues produits.

Chez IDKids, --galaxie comptant prêt-à-porter pour enfants (notamment Okaïdi, Obaïbi, Jacadi, Catimini, …) , jouets (Oxybul) mais aussi revue, label musical ou encore services d’accompagnement de la famille-, l’IA est déjà très utilisée mais essentiellement en interne. « Par des solutions tierces qui vont nous permettre d’optimiser un certain nombre de choses », précise Cédric Poncelet. Elle se trouve ainsi au centre du fonctionnement de « Consobaby », un site aidant les jeunes parents à trouver le bon produit en fonction de leurs usages. L’IA est également utilisée par Jacadi pour la personnalisation du parcours client.

Pour Jean-Pascal Dubreuil, les nombreuses et indéniables opportunités offertes par l’IA n’en font pas pour autant « un long fleuve tranquille » pour les entreprises qui l’utilisent. 39% selon les dernières études. « Ce n’est pas une garantie de réussite. Elle a un caractère disruptif », affirme-t-il. De plus, si de nombreux projets sont lancés, tous n’aboutissent pas car non concluants ou non rentables. « Malgré tout, il y a aussi de vraies belles réussites », relève-t-il.

Ce développement de l’IA dans les entreprises, et son corollaire de Big Data, pose néanmoins un certain nombre de questions. Dont la plus importante reste toujours en partie à résoudre : comment allez vers une gestion plus éthique des données collectées ? Un sujet poussé par les consommateurs et par la législation depuis plusieurs années. En 2016, l’avènement du règlement général sur la protection des données (RGPD) a de fait constitué une étape cruciale, mais toutes les entreprises ne s’en sont pas saisies de la même façon. « Certaines l’ont perçu comme une contrainte, d’autres comme une opportunité », précise le chercheur Alex Deslée. Chez Leroy Merlin, un « vrai travail en profondeur » a été mené à cette occasion. « Les données ont été bien triées pour savoir d’où elles viennent et où elles vont. Mais ce n’est pas le cas de toutes les entreprises », confirme Benjamin Rey.

A.C. pour la communication de la chaire TREND(S)